lunedì 11 febbraio 2013

La rimembranza






( Marcel Proust,  Dalla parte di Swann )

Je trouve très raisonnable la croyance celtique que les âmes de ceux que nous avons perdus sont captives dans quelque être inférieur, dans une bête, un végétal, une chose inanimée, perdues en effet pour nous jusqu'au jour, qui pour beaucoup ne vient jamais, où nous nous trouvons passer près de l'arbre, entrer en possession de l'objet qui est leur prison. Alors elles tressaillent, nous appellent, et sitôt que nous les avons reconnues, l'enchantement est brisé. Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous.
Il en est ainsi de notre passé. C'est peine perdue que nous cherchions à l'évoquer, tous les efforts de notre intelligence sont inutiles. Il est caché hors de son domaine et de sa portée, en quelque objet matériel (en la sensation que nous donnerait cet objet matériel), que nous ne soupçonnons pas. Cet objet, il dépend du hasard que nous le rencontrions avant de mourir, ou que nous ne le rencontrions pas.
Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et la drame de mon coucher n'existait plus pour moi, quand un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d'une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m'avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse : ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elle était moi. J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D'où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu'elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu'elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D'où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l'appréhender ? Je bois une seconde gorgée où je ne trouve rien de plus que dans la première, une troisième qui m'apporte un peu moins que la seconde. Il est temps que je m'arrête, la vertu du breuvage semble diminuer. Il est clair que la vérité que je cherche n'est pas en lui, mais en moi. Il l'y a éveillée, mais ne la connaît pas, et ne peut que répéter indéfiniment, avec de moins en moins de force, ce même témoignage que je ne sais pas interpréter et que je veux au moins pouvoir lui redemander et retrouver intact à ma disposition, tout à l'heure, pour un éclaircissement décisif. Je pose la tasse et me tourne vers mon esprit. C'est à lui de trouver la vérité. Mais comment ? Grave incertitude, toutes les fois que l'esprit se sent dépassé par lui-même ; quand lui, le chercheur, est tout ensemble le pays obscur où il doit chercher et où tout son bagage ne lui sera de rien. Chercher ? pas seulement : créer. Il est en face de quelque chose qui n'est pas encore et que seul il peut réaliser, puis faire entrer dans sa lumière.



( Giacomo Leopardi, Zibaldone, 515-516 )


Da fanciulli, se una veduta, una campagna, una pittura, un suono ec. un racconto, una descrizione, una favola, un’immagine poetica, un sogno, ci piace e diletta, quel piacere e quel diletto è sempre vago e indefinito: l’idea che ci si desta è sempre indeterminata e senza limiti: ogni consolazione, ogni piacere, ogni aspettativa, ogni disegno, illusione ec. (quasi anche ogni concezione) di quell’età tien sempre all’infinito: e ci pasce e ci riempie l’anima indicibilmente, anche mediante i minimi oggetti. Da grandi, o siano piaceri e oggetti maggiori, o quei medesimi che ci allettavano da fanciulli, come una bella prospettiva, campagna, pittura ec. proveremo un piacere, ma non sarà più simile in nessun modo all’infinito, o certo non sarà così intensamente, sensibilmente, durevolmente ed essenzialmente vago e indeterminato. Il piacere di quella sensazione si determina subito e si circoscrive: appena comprendiamo [515]qual fosse la strada che prendeva l’immaginazione nostra da fanciulli, per arrivare con quegli stessi mezzi, e in quelle stesse circostanze, o anche in proporzione, all’idea ed al piacere indefinito, e dimorarvi. Anzi osservate che forse la massima parte delle immagini e sensazioni indefinite che noi proviamo pure dopo la fanciullezza e nel resto della vita, non sono altro che una rimembranza della fanciullezza, si riferiscono a lei, dipendono e derivano da lei, sono come un influsso e una conseguenza di lei; o in genere, o anche in ispecie; vale a dire, proviamo quella tal sensazione, idea, piacere, ec. perchè ci ricordiamo e ci si rappresenta alla fantasia quella stessa sensazione immagine ec. provata da fanciulli, e come la provammo in quelle stesse circostanze. Così che la sensazione presente non deriva immediatamente dalle cose, non è un’immagine degli oggetti, ma della immagine fanciullesca; una ricordanza, una ripetizione, una ripercussione o riflesso della immagine antica. E ciò accade frequentissimamente. (Così io, nel rivedere quelle stampe piaciutemi vagamente da fanciullo, [516]quei luoghi, spettacoli, incontri, ec. nel ripensare a quei racconti, favole, letture, sogni ec. nel risentire quelle cantilene udite nella fanciullezza o nella prima gioventù ec.) In maniera che, se non fossimo stati fanciulli, tali quali siamo ora, saremmo privi della massima parte di quelle poche sensazioni indefinite che ci restano, giacchè la proviamo se non rispetto e in virtù della fanciullezza.
E osservate che anche i sogni piacevoli nell’età nostra, sebbene ci dilettano assai più del reale, tuttavia non ci rappresentano più quel bello e quel piacevole indefinito come nell’età prima spessissimo.
(16. Gen. 1821.)

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